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MédiasAfrique

Sale temps pour les médias dans les pays du Sahel

Zanem Nety Zaidi
16 octobre 2024

Au cours des dernières années, les juntes au pouvoir dans la région ont accru la répression sur les journalistes, entravant leur liberté d'informer.

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Un homme regardant la télévision avec le signal de France 24 bloqué
Les médias sont souvent contraints de diffuser des programmes favorables aux militairesImage : Olympia De Maismont/AFP

Vivre loin de ses proches et être contraint de cesser ses activités de journaliste, c'est le calvaire auquel a été condamné Newton Ahmed Barry, journaliste burkinabè. La source de ses malheurs a été de manifester sa solidarité avec les médias internationaux interdits dans son pays : "J'ai dû partir parce qu'ils ne pouvaient pas m'obliger à me taire par le biais de procédures judiciaires et de tribunaux, alors ils sont passés à l'étape suivante, à savoir attaquer mon intégrité physique, et j'ai couru le risque d'être kidnappé et peut-être tué."

Intimidation, enlèvement, assassinat

Le cas de Newton Ahmed Barry n'est pas isolé. Selon Reporters sans frontières (RSF), des centaines d'autres journalistes au Sahel sont menacés et ne peuvent plus exercer leur métier, d'autres sont enlevés et, dans le pire des cas, tués.

Les cas les plus récents comprennent la disparition de quatre journalistes et chroniqueurs en juin et juillet derniers au Burkina Faso, dont Atiana Serge Oulon, connu au Burkina Faso comme l'un des derniers journalistes osant traiter des questions militaires. Celui-ci aurait été recruté de force dans l'armée.

Au Niger, Samira Sabou, blogueuse et journaliste indépendante, a été détenue secrètement pendant une semaine l'année dernière.

Refus d'obtempérer

Les victimes de ces violences sont ceux qui refusent de se plier aux "injonctions patriotiques" des autorités militaires arrivées au pouvoir par la force, explique Malick Konaté, journaliste malien qui vit lui aussi en exil.

Il est très difficile d'être journaliste au Sahel' (M. Konaté, journaliste)

"Il est très difficile d'être journaliste au Mali en particulier et au Sahel en général. Les journalistes sont confrontés à deux options, soit s'autocensurer et suivre la ligne, soit quitter le pays, ce qui a été mon cas. Ainsi, toute personne qui se donne  à rapporter des informations est traitée comme quelqu'un qui cherche à déstabiliser le pays, ou qui est à la solde de l'Occident."

Le "traitement patriotique" de l'information, c'est-à-dire favorable au pouvoir, est imposé par les militaires et constitue à ce jour une entrave majeure à la liberté de la presse, constate Reporters sans frontières. Camille Montagu, de RSF Afrique subsaharienne, évoque également l'utilisation des réseaux sociaux dans le bâillonnement de la presse : 

"Reporters sans frontières a observé des campagnes de diffamation à l'encontre de journalistes, notamment en 2023. La journaliste Samira Sabou en a été victime avant son arrestation. Elle a été victime de messages de haine et de menaces de la part de comptes non identifiés."

Récemment, RSF et plus de 500 radios communautaires ont signé un appel pour le journalisme local au Sahel, afin de briser le silence sur le sort des journalistes enlevés et d'agir pour leur libération.

Cet appel a été reçu par les autorités, mais ce que les organisations de protection des droits des journalistes attendent, c'est un engagement à améliorer le paysage médiatique du Sahel.

Zanem Nety Zaidi Correspondant à Goma en RDC pour le programme francophone de la Deutsche WelleZanemNety