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Au Mali, les vendeurs de bétail en grève

Mahamadou Kane
25 octobre 2024

Depuis mercredi (23.10.2024), ils ont décrété un arrêt de travail illimité pour protester contre la décision des autorités militaires de Bamako de déplacer le marché au bétail.

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Mali - Bamako - Le marché au bétail
Le gouvernorat du district a décidé de fermer les sept marchés à bétail de la capitale, « pour raisons d'ordre public ». Les forces maliennes estiment que les lieux sont infiltrés par les jihadistes. Image : Imago/S. Danielson

À la suite des attaques terroristes de septembre dernier contre des infrastructures militaires à Bamako, les autorités de transition du Mali ont pris la décision de déplacer les marchés à bétail de la capitale.

Cette mesure vise à renforcer la sécurité, car une partie des assaillants aurait lancé leur attaque depuis une zone proche de ces marchés.

Cependant, cette décision a entraîné une grève illimitée des vendeurs de bétail, perturbant considérablement la disponibilité de la viande dans la capitale malienne et touchant directement les consommateurs.

Trois nouveaux marchés… mais trop éloignés

Pour remplacer les anciens marchés à bétail de Bamako, le ministre de l’élevage et de la pêche avait annoncé, à l’issue d’une rencontre avec les éleveurs, l’ouverture de trois nouveaux sites.

Situés à des dizaines de kilomètres de la capitale, ils imposent aux commerçants et clients des déplacements plus longs et plus risqués, d’autant que la situation sécuritaire est instable dans plusieurs régions du Mali.

Mariam, vendeuse de légumes au marché de Niamana, est une victime indirecte de cette grève : "On souffre de cette décision, car nos activités tournent désormais au ralenti. La plupart de mes clients ne viennent plus parce que les légumes qu’ils m'achètent étaient liés à la viande, qui a disparu sur le marché depuis mercredi. Sans la viande, les clients ne se bousculent vraiment pas pour acheter les légumes. C’est très timide."

Cette pénurie de viande entraîne un ralentissement dans d’autres secteurs du marché, touchant ainsi les revenus de nombreux commerçants comme Mariam.

Le marché au bétail de Bamako
Le président du marché à bétail de Niamana, à Bamako, a été enlevé mercredi soir 23 octobre par des hommes en civil en plein mouvement de grève.Image : Nicolas Remenex/Le Pictorium/IMAGO

Les vendeurs de bétail dans l’incompréhension

Les vendeurs de bétail, quant à eux, expriment leur frustration et leur sentiment d’abandon. Adama Ouologueme, responsable des bouchers au marché de Niamana, souligne l’impact de cette situation sur leur activité.

"On ne vend pas de viande. Nos animaux ne sont pas à vendre, et nous n’importons pas non plus d’animaux. Comme si cela ne suffisait pas, ils ont aussi arrêté, il y a 48 heures, notre président Boubou Cissé, responsable du Graabal (marché à bétail) de Niamana. Comment peut-on décider d’amener loin de la ville nos animaux sans se soucier de notre sort ? Qui va s’occuper de notre sécurité là-bas ?", se demandé-t-il.

Aldjouma Temé, un autre responsable de Niamana et originaire du centre du Mali, s'inquiète aussi de la faisabilité de cette relocalisation. "Ce n’est pas tout le monde qui a une moto pour aller à Zantiguila, situé à 80 kilomètres d’ici. Avec le contexte sécuritaire que nous vivons, je vois mal les clients aussi se déplacer jusque-là bas juste pour acheter un ou deux animaux. Certes, on aime tous l’argent, mais nos vies comptent avant tout."

Des marchés au bétail perçus comme un risque sécuritaire

Les autorités maliennes considèrent les marchés à bétail de Bamako comme des lieux pouvant abriter des éléments terroristes en raison de leur emplacement stratégique et de la forte concentration de personnes qu’ils attirent.

Depuis l’attaque de septembre, les autorités de transition ont intensifié les contrôles et restreint l’accès à ces marchés. Néanmoins, cette décision de relocalisation reste controversée, les éleveurs et les commerçants estimant que les autorités n’ont pas pris en compte l'impact socio-économique pour les acteurs locaux.

La situation demeure tendue à Bamako, où la population doit désormais composer avec une rareté de la viande, au détriment des consommateurs et des commerçants qui voient leur quotidien et leurs revenus affectés par cette crise.