Tshisekedi à Munich : "Ne soyez pas complices du silence"
19 février 2025Ce forum dans la capitale bavaroise a également été l’occasion pour le président congolais, d’attirer l’attention de la communauté internationale sur les conséquences de son inaction dans le conflit dans l’Est de la RDC où Goma et Bukavu, dans le Nord et le Sud-Kivu, sont désormais contrôlés par le M23 et son allié rwandais.
Devant l’assistance, Félix Tshisekedi a déclaré que l'agression dans l'est de la RDC n'était pas un simple conflit frontalier, mais une manœuvre calculée et motivée par des ambitions économiques et expansionnistes.
"À Masisi, il y a une mine dans un endroit appelé Rubaya, et il y a du coltan, du tungstène, de l'étain et du tantale, des matériaux qui alimentent ce conflit et conduisent à l'effusion de sang", a déclaré le président congolais en accusant le Rwanda.
"Pour piller ces ressources, les Rwandais doivent créer une instabilité permanente, de sorte que l'État n'a aucune autorité dans cette région", a ajouté Félix Tshisekedi.
Accusations et réfutations
Le ministre rwandais de la Défense, Juvénal Marizamunda, qui était également présent à cette Conférence de Munich, a contesté les déclarations de Félix Tshisekedi. Pour lui, le récit de l'agression rwandaise déforme la nature de la relation entre le Rwanda et l'est de la RDC.
"Le Rwanda n’a jamais attaqué le Congo. Ce que nous avons fait, c’est investir dans l’économie de l’est de la RDC ", a déclaré le ministre Marizamunda.
Félix Tshisekedi a également tenu à revenir sur les souffrances de son peuple. Il a rappelé que le problème va bien au-delà de la RDC et que l’inaction de la communauté internationale pourrait être coûteuse à long terme.
"Ne soyez pas complices du silence, l’histoire nous regarde. Si nous laissons les choses évoluer, cela aura des répercussions bien au-delà des frontières de la République démocratique du Congo", a-t-il déclaré.
Privilégier les solutions locales
De leur côté, les experts présents à la conférence, ont partagé les sentiments du président Tshisekedi sur les conséquences humanitaires du conflit, mais ils ont suggéré des solutions locales pour une sortie de crise et le retour d’une paix durable.
Hichem Khadhraoui, directeur général du Center for Civilians in Conflict (CIVIC) à La Haye aux Pays Bas, a précisé que sur les souffrances infligées aux populations civiles.
"Nous devons commencer au niveau local... les parties au conflit doivent se parler", a-t-il fait savoir.
Annette Weber, représentante spéciale de l’Union européenne pour la Corne de l’Afrique a également plaidé pour des stratégies différentes dans la résolution des conflits. Elle a souligné qu’une approche unique pour gérer les conflits est susceptible d’être vouée à l’échec : "Je pense que nous devons toujours être très précis et spécifiques. Aucun pays, aucun cas n’est le même", a-t-elle déclaré.
Prenant également part à ces échanges, l'ancien Premier ministre du Burkina Faso, Lassina Zerbo estime qu’au regard de l’actuel paysage géopolitique africain qui évolue constamment, il y a lieu de privilégier des solutions locales pour la plupart des problèmes rencontrés sur le continent.
"Notre continent a la capacité de résoudre ses propres problèmes si nous donnons du pouvoir aux acteurs locaux et si nous tirons parti des mécanismes régionaux pour obtenir un soutien. Ce n’est qu’avec cette approche à plusieurs niveaux que les intérêts extérieurs pourront s’aligner sur les besoins de nos populations " dit Lassina Zerbo.
A Munich, malgré des approches divergentes, les experts ont convenu avec le président de la RDC que les conflits en Afrique nécessitent à la fois une responsabilité mondiale et des solutions menées par les Africains.