Sauf un énième rebondissement, le scrutin présidentiel se tient dimanche (24.03) au Sénégal. Ils sont sept millions les électeurs qui vont désigner le successeur du président Macky Sall. Le scrutin aurait dû se tenir il y a quasiment un mois, le 25 février dernier. Autant dire que les Sénégalais sont soulagés de se rendre aux urnes.
"C’est une bonne nouvelle pour la démocratie sénégalaise. Tout le monde était dans une situation angoissante et stressante. Je pense enfin que le Sénégal va pouvoir respirer à nouveau", faisait ainsi remarquer un Dakarois à l'annonce de la fixation de la date du scrutin présidentiel au 24 mars.
Un autre Sénégalais ajoute : "On est quand même assez fier de constater que le Conseil constitutionnel est indépendant et libre. Franchement, j’espère de tout cœur que cela va nous servir de leçon."
"Nous sommes contents car cela fait longtemps que nous attendions une date", indique encore un autre habitant de Dakar.
Manifestations meurtrières
Les Sénégalais sont contents de voter enfin ce dimanche 24 mars après tous ces rebondissements. Notamment la décision du président Macky Sall qui ne se représente pas, d’annuler le décret portant convocation du corps électoral pour le 25 février. C’était le 3 février. De nombreuses manifestations ont eu lieu pour dénoncer alors le report du scrutin. Il y a eu quatre morts. Birane habite à Dakar et il va voter ce dimanche. Il est soulagé de savoir qu’il va jeter son bulletin dans l’urne.
"Je vais voter très tôt le matin, pour pouvoir récupérer et attendre les résultats la nuit. On espère bien qu’il y aura un second tour."
Ibrahima 23 ans va voter pour la première fois. Il n’est pas déçu de voir le scrutin se tenir un mois après la date qui avait été retenue. Même s’il sait pour qui il va voter, l’électeur estime que les candidats n’ont pas abordé les préoccupations qui lui tiennent à cœur pendant la campagne.
Simbika habite à Louga, c’est à environ 200 kilomètres de Dakar. La ville est située dans le nord-ouest du Sénégal. L’auditeur se dit soulagé de voter. Pour l’auditeur, le chômage est le premier défi à relever par le prochain président. "Tous les jeunes du Sénégal sont des chômeurs", indique-t-il.
Officiellement, le chômage au Sénégal est chiffré à 20%. Et des milliers de Sénégalais sont obligés de quitter le pays chaque année en pirogue. Le pays a été régulièrement endeuillé par des drames de la migration. Au moins 26 corps sans vie ont été retrouvés au large de Saint-Louis début mars.
Le Conseil constitutionnel, arbitre du jeu
Le scrutin se tient je le rappelle alors qu’il a été émaillé par de nombreux rebondissements. Par exemple, il y avait eu différentes périodes pour la tenue du scrutin : décembre, juin. Le Conseil constitutionnel avait décidé que le scrutin doit se tenir le 31 mars avant de s’aligner sur le 24 mars proposé par Macky Sall. Le candidat recalé du PDS Karim Wade avait saisi la Cour suprême pour suspendre les décrets fixant le vote et la campagne électorale. Avec Ousmane Sonko qui n’est pas non plus candidat, Yero de Dakar se dit déçu.
Le Sénégal a fait la une de l’actualité internationale en raison des rebondissements lors de ce processus électoral. La Cédéao a par exemple produit des communiqués sur la situation. L’organisation sous-régionale a dépêché une équipe de 130 observateurs conduite par l’ancien chef de la diplomatie nigériane et ancien sous-secrétaire général des Nations unies Ibrahim Gambari. Dans le communiqué qui annonçait l’envoi de cette mission d’observation, la Cédéao a exhorté à la paix, la tolérance et à la réconciliation.
Le scrutin présidentiel va se tenir à moins de dix jours de la fin du mandat de Macky Sall qui est encore en fonction. Pas de date encore du second tour s’il devrait être organisé. Dans une interview à la BBC, Macky Sall a encore rappelé qu’il quitterait le pouvoir le 02 avril. Le chef de l’Etat sénégalais qui a déclaré qu’il ne va pas s’excuser. Macky Sall indique en outre que s’il avait été suivi dans ses décisions, Karim Wade et Ousmane Sonko auraient été candidats au scrutin présidentiel.
Campagne électorale raccourcie
Babacar Ndiaye, directeur de recherche du think tank Wathi. L’analyste politique explique que les candidats ont dû s’adapter pendant une campagne qui n’a duré que deux semaines au lieu des trois semaines prévues par la loi.
"Ce qui a manqué, c’est que nous n’avons pas eu de débat entre les candidats. Cela aurait permis d’avoir des éclairages supplémentaires sur la conduite des politiques publiques, sur les éléments de programmes qui sont consignés dans les projets de société qui ont été présentés aux Sénégalais."
Existe-t-il des craintes d’une crise post-électorale ? Selon l’analyste politique Babacar Ndiaye "les Sénégalais ont toujours voté et se sont remis au travail le lendemain". Il espère tout de même que le scrutin va se dérouler dans le calme et la transparence.
Le Sénégal a toujours été considéré comme l’un des pays les plus stables en Afrique de l’Ouest alors que la sous-région a été secouée par des putschs. Le scrutin présidentiel s’annonce très ouvert. Les experts n’excluent pas des tensions en cas de victoire d’un candidat au premier tour.
D’après la direction générale des élections, les bureaux de vote seront ouverts à 8h et fermeront à 18h, soit 10 heures de vote. Les résultats pourraient être connus la nuit.