RDC-Rwanda : plusieurs initiatives et toujours pas de paix
26 janvier 2025C'est jeudi soir (24.01.2025), à Ankara, lors d'une rencontre avec son homologue rwandais Paul Kagame, que le président turc Recep Tayip Erdogana fait part de la disposition de son pays, la Turquie, à "apporter toute l'aide nécessaire pour résoudre la (crise) entre le Rwanda et la République démocratique du Congo".
Une proposition qui intervient alors que les combats entre les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, et l'armée congolaise ce sont intensifiés, dans l'est de la RDC, ces derniers jours. A tel point que l'Onu, qui a des forces sur place, s'est inquiétée que le conflit dégénère en une "guerre régionale".
Une proposition de médiation qui interroge
Très active au plan diplomatique et économique en Afrique, la Turquie est intervenue récemment, plutôt avec succès, dans le différend entre l'Ethiopie et la Somalie, deux voisins de la Corne de l'Afrique.
Selon Fred Bauma, directeur exécutif de l'Institut congolais Ebuteli, il est difficile d'évaluer pour le moment les chances de réussite de la Turquie en ce qui concerne la crise entre Kinshasa et Kigali.
Mais il souligne que "la Turquie a une influence de plus en plus croissante dans la région avec de plus en plus d'investissements en RDC, une coopération militaire avec la RDC et aussi de bonnes relations avec le Rwanda."
Selon le chercheur il faudrait encore que cette médiation soit acceptée par les deux parties et il reste maintenant à voir si "le processus actuel qui est mené avec le parrainnage de l'Union africaine" tiendra compte de cette éventuelle médiation de la Turquie.
"L'impossible conciliation"
Pour ramener la paix, l'Union africaine, la Communauté de développement d'Afrique australe, la SADC, ou encore la Communauté d'Afrique de l'est, l'EAC, ont pris des initiatives.
Lors de la 24e réunion des chefs d'Etat de la Communauté d'Afrique de l'Est, le 30 novembre dernier, un appel a été lancé pour combiner les pourparlers de Luanda et de Nairobi avec, comme objectif, d'apaiser les tensions entre le Rwanda et la République démocratique du Congo. Mais cette initiative est demeurée sans succès.
Pour les autorités congolaises, la résolution de la crise passe notamment par des sanctions ciblées contre le Rwanda, soutien du M23. Le président congolais Félix Tshisekedi ne cesse ainsi de réclamer des sanctions ciblées contre son voisin.
"La RDC veut qu'on sanctionne le Rwanda, de l'autre côté l'UA, la SADC, l'EAC sont pour une résolution de la crise à travers le dialogue. Il y a là une impossibilité politique d'arriver à la conciliation des points de vue" estime Tumba Alfred Shango Lokoho qui enseigne à l'Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle.
Selon lui, pour le président congolais Felix Tschisekedi et la RDC "il y a cette impression qu'il y a une forme d'hypocrisie de l'Union africaine, de la SADC, de l'EAC qui n'osent pas condamner fermement celui que la RDC considère comme l'agresseur c'est à dire le Rwanda."
Par le passé, plusieurs pays occidentaux ont sanctionné le Rwanda et demandé qu'il cesse son soutien au M23.Après une nouvelle escalade de la violence, les Etats-Unis ont appelé, en février 2024, lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'Onu, le Rwanda et la République démocratique du Congo (RDC) à "s'éloigner d'un risque de guerre".
Vers de nouveaux mécanismes?
Pour l'expert en gouvernance Dany Ayida, responsable du Bureau du National Democratic Institut en RDC "la diplomatie, aussi bien au niveau continental qu'au niveau des organisations sous-régionales qui ont tenté de résoudre cette crise, n'est pas suffissament structurée et forte pour faire fléchir les positions des uns et des autres".
Selon lui "on verra avec les nouvelles donnes" s'il y aura des mécanismes qui seront proposés et si "les parties belligérantes vont entendre raison".
En attendant, ce sont toujours les populations civiles qui continuent de payer le prix fort dans un conflit qui perdure dans l'est de la RDC.