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RDC : les salaires mirobolants des élus secouent l'Assemblée

Jean-Noël Ba-Mweze
1 septembre 2022

Les accusations de Martin Fayulu provoquent des remous. Certains réclament un audit des institutions congolaises.

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RDC: vue du Palais de la Nation qui abrite l'Assemblée congolaise, à Kinshasa
Certaines voix réclament un audit des institutions congolaises, de l'Assemblée à la présidenceImage : Antoine Moens de hase

En République démocratique du Congo, la polémique autour dessalaires des députés nationaux se poursuit après que l'opposant Martin Fayulu, coordonnateur de la coalition Lamuka, a révélé qu'un député national percevrait 21.000 dollars par mois.

Selon ces révélations, un député national congolais serait donc mieux payé que ses collègues en Europe ou aux Etats-Unis.

Si les montants sont contestés, ces accusations ébranlent l'Assemblée nationale à la veille des élections attendues en 2023, dans ce pays où la majorité de la population vit dans la pauvreté.

Manifestation de grande ampleur à Kinshasa, en 2019, en soutien à la candidature de Martin Fayulu à la présidentielle
En 2019, Martin Fayulu a été battu à la présidentielle. Il dirige maintenant la coalition d'opposition Lamuka. C'est lui qui a soulevé le lièvreImage : John Wessels/AFP/Getty Images

Les accusations de Lamuka

L'enveloppe mensuelle des députés nationaux dépasserait même le montant de 21.000 dollars qu'a dénoncé Martin Fayulu, coordonnateur de la coalition de l'opposition Lamuka. Prince Epenge, un des porte-paroles de Lamuka, chiffre les abus en ces termes : "15.756.000 francs congolais d'émoluments, 14.600.000 de primes diverses, 10.429.000 francs congolais de réserve parlementaire. A chaque participation à une commission parlementaire, ils ont plus de 1.000 dollars de jetons de présence, à chaque vacance parlementaire plus de 3.000 dollars, à chaque congrès plus de 1.000 dollars. Aussi, 1.000 dollars chaque mois pour les députés de l'Union sacrée."

La somme totale des montants avancés par Prince Epenge atteindrait donc plus de 25.000 dollars par mois.

Silence et opacité

Plusieurs députés contactés n'ont pas voulu s'exprimer sur ce sujet. Or c'est justement cette opacité qui accentue la polémique autour de la question, de l'avis de Florimond Muteba, président du conseil d'administration de l'Observatoire de la dépense publique (ODEP).

"Il y a un budget qui a été voté, la loi des finances 2022, il y a les états de suivi budgétaire, mais sur la question des émoluments touchés par les députés, il y a une opacité. Il y a quelques années, on savait tous que les députés touchaient 4.000 dollars à un taux de change qui n'était pas très favorable pour eux. Mais aujourd'hui on nous parle de 21.000 dollars ! Qu'on lève l'opacité sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres", s'indigne-t-il.

Une manifestation d'étudiants à l'intérieur du Parlement de RDC (archive)
Des experts réclament de surveiller de plus près ce qui se passe à l'intérieur de l'Assemblée de RDCImage : Jean-Noel Bamweze/DW

Nécessité d'un audit total

Il faudrait plutôt un audit pour tirer au clair cette affaire qui ne serait que de la corruption politique et parlementaire, selon Hubert Kabasubabo Katulondi. Le politologue et écrivain congolais réclame en effet un audit "à la fois à l'Assemblée nationale et au niveau du Sénat".

Mais selon lui, "cela ne suffit pas, il faut aller au-delà pour faire l'audit même au niveau de la présidence et au niveau du gouvernement". Hubert Kabasubabo Katulondi s'étonne de ce que "même les députés et les sénateurs de l'opposition sont concernés et n'ont jamais remis en cause cette pratique de la corruption parlementaire et politique systématisée qui est une pathologie de la dictature qui s'amplifie en RDC."

Cette affaire survient à un peu plus d'un an des élections attendues en 2023 et justement, lors de leur campagne électorale, les candidats députés risquent de devoir justifier auprès de leurs électeurs leurs émoluments.