Qui est Corneille Nangaa, le leader de l'AFC ?
31 janvier 2025En République démocratique du Congo, après la chute de la ville de Goma, l'Alliance du fleuve Congo, l'AFC, et sa branche armée, le M23, avancent vers Bukavu, la ville capitale de la province du Sud-Kivu. L'AFC est dirigé par l'ancien président de la Commission électorale de la RDC Corneille Nangaa. Un Congolais originaire du nord-est du pays qui a quitté le monde politique pour prendre les armes. Un parcours qui l'a conduit de Kinshasa à Goma, qui vient de tomber entre les mains des rebelles du M23.
D'économiste à président de la Céni
Né le 9 juillet 1970 à Bogboya, dans le territoire de Wamba, dans l'ex-Province orientale de la République démocratique du Congo, Corneille Nangaa a étudié à l'université de Kinshasa, où il a obtenu un diplôme de licence en sciences économiques.
Mais l'économiste de formation s'est très tôt intéressé aux questions électorales. Il a travaillé dans l'assistance technique électorale dans une dizaine des pays, dont la Côte d'Ivoire, la Guinée, le Niger, le Cameroun, le Gabon et le Kenya.
En 2005, il a intégré la Commission électorale nationale indépendante, la Céni, comme superviseur technique national et y a coordonné les opérations électorales sur le terrain.
Il était aussi directeur des programmes à l'Ecole de formation électorale en Afrique centrale, avant sa nomination au poste de secrétaire exécutif adjoint de la Céni, en 2013.
Proposé par plusieurs confessions religieuses en remplacement de l'abbé Apollinaire Malumalu, l'ancien président de la Céni, qui avait démissionné pour des raisons de santé, la candidature de Corneille Nangaa s'est toutefois heurtée à l'opposition de l'Eglise catholique qui suspectait des manœuvres de corruption.
Mais devant son maintien, l'église catholique avait alors décidé de se retirer des confessions qui composent la Céni.
Corneille Nangaa a ensuite dirigé la Céni de 2015 à 2021. Il est notamment accusé d'avoir manipulé le scrutin de 2018 qui a vu la victoire de l'actuel président Félix Tshisekedi : un résultat contesté par l'opposant Martin Fayulu et la Conférence épiscopale nationale du Congo, la Cenco.
L'exil puis la rébellion
Frustré de ne pas être récompensé pour son rôle dans l'arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi, Corneille Nangaa fonde, en 2023, son parti politique, dénommé Action pour la dignité du Congo et de son peuple, l'ADCP, et se déclare candidat à la présidentielle de décembre 2023, pour affronter le président sortant, Félix Tshisekedi.
Mais quelques mois plus tard, Corneille Nangaa se dit menacé par le pouvoir, après avoir révélé l'existence d'un accord secret entre l'ancien président Joseph Kabila et l'actuel, Félix Tshisekedi. Il aurait participé à cet accord en déclarant ce dernier vainqueur de la présidentielle de 2018.
Il décide ensuite de quitter le pays et c'est à partir de Nairobi, au Kenya, qu'il annonce, en 2023, la création de l'Alliance Fleuve Congo, l'AFC, une plateforme réunissant des représentants politiques, de la société civile et des groupes armés, dont le M23.
Alors que les rebelles du M23 poursuivaient leur progression dans la province du Nord-Kivu, la justice militaire a organisé, en août 2024, un procès à l'issue duquel Corneille Nangaa, son épouse, son oncle paternel et une vingtaine de ses collaborateurs ont été condamnés à mort.
Après la chute de Goma, cette semaine, Corneille Nangaa est réapparu, ce jeudi, à l'occasion d'une conférence de presse organisée par le M23. "Nous sommes à Goma pour y rester", a déclaré Corneille Nangaa. Et "nous allons continuer la marche de libération jusqu'à Kinshasa".
Prendre le pouvoir par la force : c'est aujourd'hui le but de l'ancien président de la Commission électorale, dont le parcours a montré qu'il n'avait pas une grande estime pour la démocratie.