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Les rebelles ADF profitent de l'absence de l'Etat congolais

Pascal Mapenzi
18 juin 2024

Les rebelles ougandais de l'ADF continuent à progresser à Beni, dans l'est de la RDC. Récemment, ils ont occupé une zone minière à Kantine.

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Un sodat tenant son arme dans l'est de la RDC
La progression des rebelles devrait aussi avoir des conséquences économiques dans la régionImage : Alexis Huguet/AFP/Getty Images

Selon la société civile locale, au moins 150 personnes ont été tuées en une semaine dans les villages de cette zone minière qui constituait le dernier refuge pour ceux qui fuyaient les violences de ce groupe armé. Le gouvernement congolais, pour sa part, a reconnu 41 morts. C'est l'une des attaques les plus meurtrières des rebelles ADF qui devrait aussi avoir des conséquences économiques dans la région. 

L'absence de l'Etat

La société civile de Beni s'inquiète de la progression des rebelles ADF qui élargit sa zone d'action. La grande crainte de la société civile est que la rébellion contrôle désormais des carrés miniers dans une région jadis contrôlée par des miliciens Maï-Maï et où l'Etat est presque inexistant.

Des soldats lors d'une opération militaire à Beni
La société civile craint que la rébellion contrôle désormais des carrés miniers dans une région joù l'Etat est presque inexistantImage : Alain Uaykani/Xinhua News Agency/picture alliance

"Notre crainte est que la présence des carrés miniers dans ce groupement puisse être aussi un facteur attirant pour ces rebelles, eux qui peuvent chercher à y rester à tout prix parce que dans leur tactique, ils cherchent aussi des moyens pour survivre. Notre inquiétude, par ailleurs majeure à ce niveau, est qu'il y a absence de l'autorité de l'Etat dans une grande partie de ce groupement. C'était d'abord des Maï-Maï qui étaient dans certains coins, mais pas d'ANR (services de renseignements), pas de police, pas de FARDC (armée congolaise) dans plusieurs villages. Et lorsque l'ADF pénètre là-bas, c'est une grande crainte", précise Richard Kirimba le leader de la société civile dans la région.

Tout abandonner et fuir

Dorika Kahambu s'était déjà bien implantée au village de Kantine, situé dans cette zone minière. Elle y cultivait du haricot, de l'arachide, du maïs et du riz. Fin juin, elle devait commencer à récolter ses produits pour ensuite les revendre en ville. Mais elle a dû tout abandonner à cause de l'avancée des rebelles.

Des déplacés congolais transportent leur affaires et traversent la frontière vers l'Ouganda
Le président de la Commission de l'Union africaine a appris avec consternation la multiplication de massacres de populations civiles innocentes par les Forces démocratiques alliées (ADF) dans les territoires de Béni et de LubéroImage : Nicholas Kajoba/Xinhua/IMAGO

"Ils ont brûlé nos maisons et tout a été calciné. Ceux qui revenaient des champs le jour de l'attaque sont tombés dans des embuscades. Beaucoup de gens sont morts, et il n'y a plus personne au village", rappelle Dorika.

Selon elle "la nourriture était prête à la récolte, mais elle va pourrir dans les champs. Ils sont vraiment venus au mauvais moment. Il y avait une bonne ambiance au village et de nombreuses familles s'y étaient déjà installées". 

Ces nouveaux villages attaqués par les rebelles ravitaillaient en produits vivriers les villes de Beni, Butembo et Oicha, dans la province du Nord-Kivu.

L'impact sur l'économie

L'économiste Nestor Mukotsi redoute désormais une pénurie alimentaire dans les centres urbains. "Kantine constituait déjà le grenier d'Oicha, Butembo, Beni, même Bunia. Parce que c'est l'unique coin qui était un peu calme. Donc comme aujourd'hui Kantine est touchée, il y aura un problème de carence des produits sur le marché, et comme il y aura rareté, il y aura hausse des prix", explique l'économiste.

Le 11 juin dernier, dans un communiqué, le chef du groupement de Bapere, voisin de celui occupé depuis une semaine par les rebelles de l'ADF, a alerté sur l'entrée de ces rebelles dans son territoire, près de Mangurejipa, une autre zone minière en territoire de Lubero. 

Le territoire fait aussi face à la menace de la rébellion du M23 qui tente d'entrer, depuis quelques jours, dans ce territoire par Kanyabayonga.