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Prévention santé pour femmes immigrées

23 novembre 2007

Soutien liguistique dans le domaine médical : mettre des mots sur son mal n'est pas facile, surtout en pays étranger. D'où les interventions de l'association Pro Familia en Allemagne auprès de femmes d'origines diverses.

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Pour les femmes immigrées aussi, il est essentiel de savoir parler de son corps.
Pour les femmes immigrées aussi, il est essentiel de savoir parler de son corps.Image : picture-alliance/ dpa

Un reportage de Sandrine Blanchard, Bonn.

Quand on a mal quelque part, il suffit d'aller chez son médecin. Oui mais comment faire lorsqu'on ne parle pas la même langue que lui, pour lui expliquer où ça fait mal et comprendre son diagnostic ? C'est pour remédier à ces difficultés linguistiques que rencontrent les étrangers dans un cabinet médical que l'association Pro Familia a mis en place en 2000 un programme gratuit d’information et de soutien à destination des femmes immigrées de la ville de Bonn.

« Essayez de sortir, de rencontrer des gens... »

Bien plus qu'un cours de langue, une ouverture sur la société du pays d'accueil.
Bien plus qu'un cours de langue, une ouverture sur la société du pays d'accueil.Image : dpa

Statistiquement, ce sont les femmes qui, le plus souvent, emmènent leurs enfants chez le pédiatre. Elles doivent aussi consulter régulièrement un médecin, pour leur suivi gynécologique par exemple. Et là encore, il faut qu'elles osent franchir le seuil du spécialiste et qu'elles trouvent les mots pour lui parler de ce qui ne va pas. Le programme de Pro Familia, financé par la municipalité, allie donc cours de langue et aide psychologique.

Dans ce quartier périphérique de Bonn, contrairement au centre ville, on voit plus de logements sociaux que de villas 1900. C'est là que Gabriele Görk, enseignante de l’université populaire de Bonn, vient deux fois par semaine enseigner aux femmes immigrées d'Auerberg les rudiments de la langue allemande. Aujourd’hui, elles sont sept dans la classe. Elles viennent du Kazakhstan, d’Ouzbékistan, d’Albanie, de Biélorussie ou de Turquie, sept femmes d’âges et d'horizons très variés qui ont bravé la pluie et le vent pour se rendre, comme tous les mardis à leur cours d’allemand. Gabriele Görk s'efforce de mettre ses élèves à l'aise :

« Pour l'instant, faites ce que vous pouvez ! On répète souvent les nouveaux mots, on répète, on répète…Comme ça, vous apprenez quand même un peu…L'important, c’est d’essayer de venir régulièrement ! Et puis, essayez de sortir, de rencontrer des gens. Ne pas toujours rester avec les enfants… les enfants c'est bien mais, des fois, une maman a besoin de voir d’autres gens, de souffler. D'accord ? Bien. »

L'occasion de briser certains tabous

La visite chez le pédiatre, une épreuve pour qui ne maîtrise pas la langue locale.
La visite chez le pédiatre, une épreuve pour qui ne maîtrise pas la langue locale.Image : picture-alliance/ dpa

Aujourd'hui, le cours était un peu particulier. Il ne portait ni sur la grammaire ni sur la syntaxe : la classe recevait une intervenante extérieure : Shohreh Ghavidel de l'association Pro Familia. Elle est venue expliquer aux immigrées présentes le type d’aide fournie au siège de l'association : psychologue, gynécologue, conseiller matrimonial.

Après l'intervention, elle fait remarquer : « Vous avez vu, la dame de Biélorussie demandait constamment si c'était payant. Il y en a beaucoup qui pensent ça. »

La dame biélorusse, c'est Jana : « C’est bien de connaître les mots justes, pour les choses intimes, sur la femme. Ca va m’aider. C'est bien aussi que Pro Familia mette un gynécologue à disposition ou un pédagogue pour les enfants. Comme ça je pourrai mieux expliquer au pédiatre où mon enfant a mal, sinon c’est mon fils qui doit le dire lui-même au médecin. »

Shohreh Ghavidel distribue aux élèves une planche anatomique. Elle montre l'appareil génital féminin, les noms allemands des principaux organes et maladies, différentes méthodes de contraception. Son objectif : amener les femmes de la classe à maîtriser un vocabulaire précis, et à briser les tabous culturels jusqu'à être capables d’appeler un vagin un vagin, lorsqu'elles se rendent chez un gynécologue, par exemple.

« D'après ce que j'ai pu observer jusqu'à présent, les femmes qui ont le plus de problèmes sont celles qui n'osent pas en parler ouvertement. Mais quand elles voient que dans le groupe, les autres femmes parlent sans complexes, cela les amène à réfléchir », explique Shohreh Ghavidel.

Pas de répit pour Pro Familia

Hommes et femmes immigrés doivent apprendre à communiquer sur certains sujets encore tabous.
Hommes et femmes immigrés doivent apprendre à communiquer sur certains sujets encore tabous.Image : dpa - Bildfunk

Et la leçon semble avoir porté ses fruits, comme l'explique Nasish, du Pakistan :

« Je suis séparée d’avec mon mari et j’habite dans un foyer. Là-bas, je parle avec les autres femmes. Des fois, c’est dur, avec les enfants. Quand on doit aller chez le médecin, je ne comprends pas tout. Mais avec les mots que j’ai appris aujourd’hui, je pourrai dire que j’ai tel ou tel problème. C’est bien pour moi et pour mes enfants. »

Nasish pourra approfondir les connaissances acquises en suivant une nouvelle formation de Pro Familia. Libre choix de sa sexualité, contraception, violence ou maladies honteuses, autant de thèmes qui seront là encore abordés, mais avec cette fois une nouveauté de taille : la présence d’hommes au sein du groupe.

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A écouter aussi dans cette émission :

  • Les grandes peurs des Européens : Les Français ont peur de l’avenir et du chômage et surtout ils sont très nombreux à avoir peur de se retrouver pauvre et SDF. Bien plus que chez nos voisins européens. C’est ce qui ressort d’une étude du Centre d’Analyse Stratégique (l'ancien Commissariat au Plan) sur les « réalités sociales françaises à l’aune européenne ». Si l’on en croit les médias, les Tchèques ont peur de tout, du terrorisme, des changements climatiques, des hasards de la météo, d’un abandon par les Occidentaux et d’un retour des Russes….Le mot qui revient le plus souvent dans les media est « hrozi », autrement dit, menace, ou « kalamita » pour une simple tempête de neige qui entrave la circulation.
  • Portrait : Nadejda Orlova, le « nouveau visage » de Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine.
  • Carnet de voyage : Mer celtique, un beau néologisme pour décrire ce territoire celte qui va du Nord de l’Ecosse aux Asturies et à la Galice en Espagne en passant par l’Irlande, l’Ile de Man , les Cornouailles et la Bretagne. C’est aussi le titre d’un très bel ouvrage , illustré par les photographies de Philip Plisson et les textes de Patrick Mahé.