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Le Bénin, pays dangereux ?

19 octobre 2020

L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a retiré le Bénin de la liste des "pays d'origine sûrs", début octobre, pour une durée de douze mois. Une décision qui fait débat.

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Le président Patrice Talon est accusé de dérives autoritaires par ses opposants
Le président Patrice Talon est accusé de dérives autoritaires par ses opposants Image : picture-alliance/abaca/E. Blondet

À quelques mois de l’élection présidentielle, le Bénin se trouve dans une situation inédite, avec plusieurs leaders de l’opposition qui ont préféré s’exiler. C’est notamment ce qui explique la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Elle vient de retirer le Bénin de la liste de "pays d'origine sûrs", c'est à dire des pays "respectant l'Etat de droits et les libertés fondamentales". Une décision qui devrait influer les demandes d'asile en France mais qui provoquent aussi de nombreux débats en interne au Bénin, tant ses conséquences politiques et économiques pourraient être grandes. 

"Atteinte à la démocratie"

"Cela fait un moment que nous déplorions la situation d’atteinte aux libertés publiques, à la démocratie ici au Bénin", commente désormais Donklam Abalo, porte-parole du parti politique d’opposition USL, parti de l’homme d’affaires Sébastien Germain Ajavon en exil en France. "Les autorités du Bénin devraient pouvoir prendre la mesure de la situation et essayer de la corriger. Puisque l’Ofpra donne la possibilité de corriger ça sur un an". Et l'homme de demander "un effort de la part du gouvernement".

Conséquences économiques

Si certains voient donc d'un bon oeil cette décision, ce n'est pas le cas de tout le monde. Le porte-parole du gouvernement et ministre de la Communication, Alain Orounla, s'en est pris aux opposants "qui ne cessent de clamer partout que les libertés sont en recul au Bénin". 

Ancien allié de Patrice Talon, Sébastien Germain Ajavon a été condamné en octobre 2018 à 20 ans de prison pour trafic de drogue
Ancien allié de Patrice Talon, Sébastien Germain Ajavon a été condamné en octobre 2018 à 20 ans de prison pour trafic de drogueImage : Getty Images/AFP/C. Placide

L’avocat Sadikou Ayo Alao, membre de la société civile béninoise, craint lui des conséquences économiques importantes. "On est obligé de recourir tous les jours à des emprunts pour payer les charges les plus élémentaires comme les salaires", raconte-t-il. "Mais un jour, le peuple rebellé insolvable refusera de payer. Et la décision de l’OFPRA ne peut que décourager des emprunteurs potentiels. Le terminus n’est pas loin parce qu’on ne peut pas continuer de prêter à un pays dont les emprunteurs se lasseront et refuseront un jour de rembourser la dette."

"Aucune conséquence"

Les électeurs béninois se rendront aux urnes au printemps 2021 pour élire leur président de la République
Les électeurs béninois se rendront aux urnes au printemps 2021 pour élire leur président de la RépubliqueImage : picture-alliance/Godong/P. Lissac

Pour sa part, le gouvernement défend son action contre la délinquance économique. "Nous ne nous reconnaissons pas dans le procès d’intention qui est fait, dès lors que le Bénin s’est attaché à la consolidation de la démocratie, à l’Etat de droit", insiste Alain Orounla. "Il n’y a aucun risque qu’un investisseur sérieux s’éloigne. Je considère que l’Ofpra n’est pas le baromètre de la gouvernance au Bénin, n’est pas juge de la démocratie béninoise et donc ce déclassement n’appelle aucune conséquence", insiste le porte-parole du gouvernement. C’est dans ce climat assez tendu que le Bénin prépare sa septième élection présidentielle, qui se tiendra en avril 2021.