Lanceur d'alerte en Afrique, activité à risque
14 février 2019Comme des sentinelles, les lanceurs d'alerte sont à l'avant-garde dans beaucoup de pays africains dans la lutte contre les crimes perpétrés par les élites politiques ou économiques.
Mais souvent ceux-ci sont seuls et bénéficient de peu de protection.
On peut citer le cas du Kenyan John Githongo qui a rendu public dans son pays la conclusion de contrats frauduleux d'équipement militaire.
Ou celui de Jean-Jacques Lumumba, qui vient d'assigner en justice son ancien employeur, la banque BGFI et sa filiale congolaise. Celui-ci avait signalé à sa hiérarchie des détournements de fonds publics et l'existence de comptes liés au financement du terrorisme.
Cette faiblesse de la protection des lanceurs d'alertes inquiète Henri Thulliez, membre fondateur de la plateforme de protection des lanceurs d'alerte en Afrique.
"Souvent menacés, harcelés, intimidés, voire parfois menacés de mort. Ils sont vraiment conspués et transformés en ennemis publics numéro un, alors qu'ils devraient être protégés, remerciés et félicités pour avoir fait ce qui leur paraissait être juste, c'est-à-dire jeter de la lumière sur des activités illicites, illégales ou contraires à l'intérêt général, pour le bien de l'intérêt général."
A l'instar de la plateforme de protection des lanceurs d'alerte en Afrique, des réseaux sont créés sur le continent pour essayer d'apporter une assistance technique, juridique et médiatique.
Mais pour Georges Kapiamba, avocat et défenseur des droits humains, l'unique façon d'assurer à ces vigiles une protection effective, c'est de renforcer l'état de droit.
"Lorsque quelqu'un participe à la dénonciation de détournement de deniers publics, de faits de corruption et de blanchiment de capitaux, il agit comme un dénonciateur, et même dans notre propre arsenal juridique ces personnes sont déjà protégées par la loi. Ils ont même droit à plus ou moins 10 ou 15% des montants récupérés à la suite de leur dénonciation. Donc il est question tout simplement d'appliquer la loi et d'avoir des acteurs étatiques engagés réellement pour protéger ces personnes."
Ce cadre juridique reste toutefois encore très faible en Afrique.
Jusqu'à présent, seuls sept pays sur 54 ont adopté des lois de protection des lanceurs d'alerte, contre onze sur 28 en Europe.