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La Turquie a son Prix Nobel

Yann Durand13 octobre 2006

L’écrivain turc, Orhan Pamuk, s’est vu attribuer hier le prix Nobel de littérature. D’aucuns jugent ce choix plus politique que littéraire : le romancier avait en effet été poursuivi pour insulte à l’identité turque. Ironie du sort, la France a voté hier également une loi qui interdit la négation du génocide arménien suscitant la colère des autorités turques. La presse allemande en revanche salue le premier prix Nobel de littérature turc.

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Orhan Pamuk incarne la Turquie progressive
Orhan Pamuk incarne la Turquie progressiveImage : AP

Orhan Pamuk, professeur suppléant pour un semestre à l’université new-yorkaise de Columbia, était encore au lit lorsqu’il a reçu la nouvelle, apprend-on dans la Süddeutsche Zeitung, à laquelle le lauréat a accordé une interview. Il y révèle une certaine nervosité illustrée notamment par une question : comment la Turquie va-elle réagir, sera-t-elle fière de moi ?

Dans le cas contraire, qu’il se rassure : il est au moins la fierté de l’Occident, comme en témoigne le quotidien Die welt qui voit en Orhan Pamuk l’incarnation de la Turquie que ‘nous’ voulons, et dont on ne sait si elle va s’imposer, la Turquie qui fait partie de nous, de l’Europe. Cette Turquie libérale, bourgeoise qui comme Pamuk reconnaît le génocide arménien, celle qui prend ses responsabilités au lieu de refouler, se voit renforcée par ce prix, affirme le journal, en espérant qu’elle sache en tirer profit.

Il est l’écrivain de la jeune élite moderne et américanisée d’Ankara et d’Istanbul – Ces élites existent dieu merci ! s’exclame la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Elles sont comme Pamuk lui-même, le premier front de notre style de vie occidental et de nos convictions. Si nous devons comprendre l’Islam – ce que nous faisons d’ailleurs sans cesse, même jusqu’ au sacrifice. Les cultures islamiques doivent aussi enfin s’efforcer de nous comprendre.

Selon la Tageszeitung de Berlin, c’est par une curieuse coїncidence que le comité du Nobel a annoncé son choix juste le jour où le Parlement français décide de sanctionner à l’avenir la négation du génocide arménien. Hélas, pour Orhan Pamuk et la littérature turque, c’est un hasard malencontreux, analyse la TAZ : l’indignation a propos du décret parisien va considérablement atténuer en Turquie la joie d’avoir reçu le prix. Et de conclure que la seule réaction correcte de la Turquie serait de rayer enfin, l’insulte à l’identité turque du code pénal afin que Orhan Pamuk soit le premier écrivain majeur turc qui n’ait jamais été en prison.