La hausse du prix de l'or profite-t-elle à l'Afrique ?
4 août 2011Abubakar Lawal est satisfait. Le marchand d'or est de passage à Accra, la capitale du Ghana, et pour lui, les affaires marchent :
« Je fais de bons profits en ce moment. Le prix mondial de l'or se répercute sur nos marchés locaux. Ici aussi le prix de l'or augmente et cela nous profite. »
Abubakar Lawal est un vendeur intermédiaire. Actuellement, il vend son or à 63 cedis le gramme, soit un peu moins de 30 euros. Un bon bénéfice par rapport au prix sur le marché mondial. (Le commerçant vient de la région de Kumasi, particulièrement riche en or.) Avec une production annuelle d'environ 100 tonnes, le Ghana fait partie des dix plus grands producteurs d'or de la planète. L'industrie minière aurifère est entre les mains de compagnies multinationales canadiennes, américaines ou sud-africaines. Ce sont elles qui profitent en premier lieu de l'exploitation de l'or, affirme Sebastian Rötters, de l'organisation de défense des droits l'Homme FIAN, qui lutte contre la faim dans le monde :
« A qui vont les profits ? C'est la grande question dans le secteur des matières premières. Les ressources naturelles du sous-sol appartiennent à l'Etat. Il a le droit de les exploiter ou d'accorder des concessions. Celles-ci vont en général à des grandes sociétés, qui doivent payer une redevance sur le minerai. Mais le pourcentage est en général très bas. »
Au Ghana, la redevance sur le minerai s'élève à 5%, mais les grandes sociétés d'exploitation bénéficient d'avantages fiscaux. Même chose en Tanzanie, le troisième pays producteur d'or sur le continent. Humphrey Moshi est économiste à l'université de Dar es Salaam :
« Malheureusement, la hausse du prix de l'or n'apporte rien à la Tanzanie. La cause principale, ce sont de mauvais contrats entre le gouvernement et les investisseurs. La plupart des entreprises ne doivent quasiment pas payer d'impôts. C'est une perte importante de revenus pour l'Etat. »
Au-delà de la production industrielle de l'or, il existe à travers le monde près de 20 millions de petits exploitants, qui extraient du sol des petits éclats d'or à l'aide de pelles et de pioches. On estime que leur travail représente 12% de la production mondiale d'or. Le problème : ils travaillent de façon illégale aux abords des grandes mines, dans des conditions très difficiles et sans aucun droit. Ce sont eux qui profitent le moins de la hausse du prix de l'or.
A Kédougou, dans le sud-est du Sénégal, l'exploitation de l'or est pratiquée de façon artisanale mais aussi industrielle. Pour savoir à qui profite la flambée des prix de l'or dans cette région, écoutez les explications d'Amadou Diop, journaliste à Kédougou. Il est au micro de Carim Camara.
Auteurs: Stephanie Duckstein / Aude Gensbittel
Edition : Jean-Michel Bos