La Bundeswehr reste au Mali
22 mars 2018Les soldats allemands vont continuer à participer à la Minusma, la mission de l'ONU pour la stabilisation du Mali. Une majorité de députés du Bundestag ont approuvé la prolongation de cette mission présentée comme la plus dangereuse de la Bundeswehr. Mais le débat a été vif entre les groupes parlementaires, seuls les populistes de droite de l'AfD et l'extrême-gauche de Die Linke ont refusé d'appuyer la demande du gouvernement.
Le gouvernement malien déçoit
Le gouvernement a décidé début mars de demander l'accord des députés pour permettre aux soldats allemands de rester 13 mois supplémentaires au Mali.
Au sein de la Minusma, ils appuient le processus de paix et la stabilisation du pays. Dans le Nord, à Gao, les Allemands ont pris le commandement des opérations onusiennes.
Niels Annen, du ministère des Affaires étrangères, a rappelé l'importance géostratégique du Mali pour l'Allemagne et l'Europe et celle des Accords d'Alger. Pour lui, le processus de paix en cours doit servir de base à la réflexion sur l'action dans le pays, tout en lançant "un appel pressant aux autorités maliennes pour qu'elles respectent leurs engagements. Cela vaut pour toutes les parties en conflit, les groupes rebelles et le gouvernement". Niels Annen a souligné que le gouvernement allemand était "un peu déçu sur certains points par le manque de volonté politique."
Refus de l'AfD
Rüdiger Lucassen, de l'AfD, a quant à lui pointé le peu de retombées tangibles de la mission de la Bundeswehr. A la tribune, le député de la droite populiste a estimé qu'il manquait à l'Allemagne "une stratégie nationale et une planification fiable [au Mali].
Par ailleurs, l'élu a souligné les déficiences de la mission actuelle : "Nous manquons d'hélicoptères capables d'évacuer nos hommes en cas de nécessité et le gouvernement allemand n'a pas l'intention d'y remédier. C'est pourquoi le groupe AfD est opposé à la mission au Mali."
"Redonner espoir aux jeunes"
Pour la ministre de la Défense, Ursula von der Leyen, l'engagement militaire s'inscrit dans une politique allemande plus large, en Afrique de l'Ouest, destinée à "redonner espoir" et des perspectives à des jeunes frappés par le chômage, sans quoi ceux-ci deviennent alors des proies faciles pour les djihadistes.
Les libéraux du FDP appuient cette argumentation et appellent les autorités maliennes à faire davantage contre la corruption et pour plus de décentralisation.
La gauche dit "non" à la militarisation
A la gauche de l'échiquier politique, Kathrin Vogler de Die Linke dénonce le manque de prévention et d'investissements dans le social pour faire cesser "l'effet domino" enclenché dans le Sahel par la guerre en Libye. Elle estime :
"Les intentions humanitaires sont bien belles, et nous soutenons d'ailleurs certains projets sur place, mais le gouvernement allemand dépense 27 millions d'euros pour la stabilisation et la prévention des conflits, tandis que la mission de la Bundeswehr coûte dix fois plus.
Le financement d'une mission aussi chère ne s'explique pas uniquement par des motivations altruistes.
Elle sert aussi de test pour une militarisation de l'Europe, en coopération avec la France. Merkel et Macron y sont très favorables. Cela signifie une nouvelle course à l'armement à laquelle nous opposons un "non" clair."
Fin mai 2019, alors que le Mali aura voté pour un nouveau président, l'Allemagne remettra à plat l'ensemble de ses participations militaires dans le pays, au sein de la Minusma, mais aussi de l'EUTM-Mali et de l'EUCAP-Sahel, les deux missions européennes de sécurité et de développement. Et les débats risquent d'être à nouveau tout aussi passionnés à Berlin.