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"La Zambie a peut-être réagi trop vite"

John Kanyunyu
14 août 2024

Interview avec Julien Paluku, le ministre congolais du Commerce extérieur, sur les tensions entre la RDC et la Zambie.

https://p.dw.com/p/4jRA4

La situation est revenue à la normale entre la RDC et la Zambie. La frontière est à nouveau ouverte entre les deux pays.

La Zambie avait fermé ses frontières avec la RDC en guise de représailles après  la décision du gouvernement congolais d'interdire l'importation de la bière et  des boissons gazeuses notamment de la Zambie.

Les malentendus sont désormais dissipés avec la réunion bilatérale ministérielle qui a eu lieu lundi dernier à Lubumbashi. Et pour en parler, John Kanyunyu s’entretient avec le ministre congolais du Commerce extérieur, Julien Paluku. 
 

Interview avec Julien Paluku


DW : Julien Paluku, en tant que ministre du Commerce extérieur, vous avez signé un arrêté suspendant l'importation de la bière, des boissons gazeuses et de chaux pour protéger les industries locales, mais les importateurs répondent que ce sont les tracasseries administratives qui les feraient fuir. Qu'en pensez-vous?

Tout pays à travers le monde veut intégrer le commerce international et il doit y arriver, non pas en tant qu’observateur, mais en tant qu’acteur.

Voilà pourquoi la RDC a ratifié l'accord de l’Organisation mondiale du Commerce, la RDC a ratifié beaucoup d'autres accords avec les pays partenaires avec lesquels elle fait du commerce. Lorsque chaque Etat, en termes d’accords, qu'il s'agisse de celui de l'OMS ou de signer avec d'autres Etats, lorsque chaque Etat trouve que sa production est menacée, il a le pouvoir de prendre des mesures de sauvegarde.

C’est ce que nous avons fait avec la Zambie pour nous permettre de gérer la production intérieure, c'est ce que nous, on fait avec l’Angola, le Rwanda, l’Ouganda, la Tanzanie, le Congo Brazzaville...

Cela ne visait pas un seul pays, mais l'ensemble des Etats qui nous entourent, pour que nous nous rassurions des règles d'origine.

Quant aux questions liées à des tracasseries au niveau interne, notre Première ministre voudrait effectivement que le ministre de l'Économie propose des mesures concrètes, qui rassurent tous les opérateurs économiques sur le fait que désormais la RDC est une bonne destination

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DW : Est-ce que vous nous confirmez que tout est de nouveau normal entre les deux pays [RDC et Zambie]?

Nous avons rappelé aux autorités zambiennes que, au terme de l'accord qui nous lie et qui date de 2015, lorsqu'une des parties se sent lésée, la partie s'adresse à son correspondant pour dire: "Votre mesure nous a posé du tort de cette manière, et nous voudrions nous rencontrer".

L’accord prévoit qu'un processus doit être déclenché, partant de la saisine de l'autre partie jusque au dialogue, de manière à arrondir les angles et trouver des voies de sorties.

Malheureusement, la Zambie a pris une mesure disproportionnée parce que nous, nous avons interdit l'importation de certains biens.

La réciprocité aurait exigé que la Zambie, par exemple, d'interdire aussi deux ou trois biens que nous produisons sur le sol congolais. Mais lorsqu'elle ferme la frontière, elle la ferme même pour les véhicules qui sont en transit, ceux qui viennent de l’Afrique du Sud, du Zimbabwe, du Malawi, de Tanzanie.

C’est ce que nous avons rappelé à la Zambie et elle a compris qu'elle a peut-être réagi trop vite au lieu de revenir à la disposition qui nous demande de nous rencontrer.

DW: Craignez-vous que ces crises menacent le projet RDC-Zambie de construction d’une usine de fabrication de percuteurs de batteries, un projet dont les populations des deux pays devraient bénéficier ?

Non, ça n'a rien à voir. C'est une crise passagère, c'est un clash, comme je l'ai dit, lié à une petite incompréhension liée à l'interprétation de notre accord.

Mais nous devenons les leaders de ces grands projets de chaînes de valeur, de production de percuteurs de batteries électriques, et plus tard de véhicules.


DW : Vous avez été gouverneur de la province du Nord-Kivu pendant douze ans, de 2007 à 2019. Quelle est votre lecture du conflit qui déchire actuellement cette partie du pays ? Et quelle aurait été votre stratégie de résolution de ces guerres répétitives?

Je ne cessera jamais de le dire: la guerre qui se passe dans les Kivu estune guerre économique, tout simplement.

Ceux qui ne comprennent pas la crise à l'est pensent que ce sibt des conflits liés à la haine, aux FDLR… Moi, j'ai toujours réfuté toutes ces allégations, parce que si le conflit était lié aux FDLR, ce conflit serait terminé.

Maintenant, qu'est-ce qu'il faut faire? Je crois que le gouvernement congolais doit poursuivre la construction de son système de défense.

Nous sommes comme une belle fille qui est dans une maison non-clôturée. La clôture, pour moi, c'est le système de défense à construire.

Il faut le consolider pour que nous ayons une armée capable de sécuriser nos frontières, capable de sécuriser aussi les voisins, parce que si on n'a pas une armée forte, les voisins croiront qu'une subversion peut se faire à l'intérieur de notre territoire et atteindre les territoires voisins.