Sidya Touré estime qu’il faut faire confiance aux militaires
7 septembre 2021L'opposant Sidya Touré, qui s'apprête à regagner Conakry, estime lui aussi qu’il faut faire confiance au lieutenant-colonel Mamady Doumbouya et à son équipe. "Nous allons faire avec", a-t-il dit au micro de Bob Barry.
L'entretien ci-dessous avec Sidya Touré
DW : Monsieur Sidya Touré, depuis dimanche, la situation politique en Guinée évolue à une vitesse supérieure. Les militaires putschistes ont arrêté le président Alpha Condé. A l’image de vos collègues de l’opposition, est-ce que vous prenez aussi acte de la fin du régime du président Condé ?
Sidya Touré : Je crois que c'est le minimum qu'on peut faire. On s'est battu pendant des années contre ce régime-là. Moi, j'étais dans l'opposition derrière Alpha Condé, il était un espoir pour nous tous. Il faut dire la vérité, ces onze dernières années ont été extrêmement décevantes. Elles ont été accablantes et extrêmement difficiles pour les Guinéens. Donc, forcément que nous prenons acte de ce qui est arrivé en se disant que c'est une nouvelle ouverture pour notre pays.
DW : Dans une interview accordée à la DW, le président de l'Union des forces démocratiques de Guinée, Cellou Dalein Diallo, le leader de l’UFDG dit faire confiance aux putschistes qui ont pris le pouvoir à Conakry. Faites-vous aussi confiance aux militaires qui ont renversé le président Alpha Condé ?
Sidya : Il y a quelque chose de nouveau. Ce monsieur (NDLR : le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya) m’a l'air très structuré. Il ne parle pas beaucoup - c'est déjà un avantage en Guinée. J'estime que ce qui a été fait jusque-là est suffisamment précis pour donner quand même l'impression que c'est bien ordonné, bien structuré et que nous allons vers l'avant, donc oui, je crois que nous allons faire avec, pourquoi pas, avec les appuis nécessaires afin d’arriver à une transition.
DW : N'avez-vous pas de craintes face à ces militaires qui ont pris le pouvoir quand on sait qu'en 2009, le capitaine Moussa Dadis Camara, qui s'était emparé du pouvoir après la mort de Lansana Conté, a voulu s'agripper à son poste, provoquant un massacre des populations civiles à Conakry ?
Sidya : Non, je crois qu'on est très loin de ça. Ces choses- là, ce sont les paranoïas que les responsables développent. Le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya n'a pas l'air d'un paranoïaque. Quand on regarde son CV, on a l'impression que oui, c'est ce qu'il fait. Et puis, honnêtement, il n’y a pas cette ébullition qu'il y avait au temps de Dadis Camara qui était venu du fait qu'il voulait garder le pouvoir définitivement. On n’en est vraiment pas là. On est très loin.
DW : Comme vous, beaucoup d'opposants guinéens avaient été empêchés de sortir de Guinée. Vous avez eu la chance de partir. Vous êtes en partance pour Conakry. Qu'est-ce que vous avez comme agenda en rentrant dans la capitale guinéenne ?
Sidya : Je vous le dirai quand j'arriverai à Conakry en fin de semaine. Je fais ma piqure anti-Covid et puis je rentre en fin desemaine à Conakry.
DW : M. Sidya Touré, vous avez été le Haut représentant du président Alpha Condé. Est-ce que votre départ du régime était un pressentiment à ce qui s'est passé dimanche dernier à Conakry ?
Sidya : Non, c'est un désaccord profond sur ce qui était en train de se préparer. Notamment le problème d'un mandat supplémentaire dans un contexte de crise financière aiguë avec le système guinéen gangrené par la corruption. On n'en parle pas beaucoup mais la corruption a atteint des niveaux insoupçonnés. Nous avions discuté, je lui ai exposé mon point de vue, mais il n'était pas d'accord - enfin disons qu'il n'a pas réagi à tout cela pendant dix-huit mois -, et j'ai décidé de partir.
DW : Les nouvelles autorités ont annoncé la mise en place d'un gouvernement de transition après des consultations nationales. Seriez-vous disposé à faire partie de ce gouvernement de transition ?
Sidya : Si je comprends bien, nous avons déjà fait de transition en Guinée, les chefs de partis ne font pas partie de ce genre de structure. Donc, je pense que ce n'est pas mon cas. Seulement le fait que c'est réservé à ceux qui ne veulent pas être candidat aux prochaines élections.
DW : Vous enverrez quand même des représentants, peut-être de votre parti.
Sidya : Je verrai tout ça quand je serai rentré à Conakry.
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