En Guinée, le tour de vis des autorités contre les médias
24 mai 2024"Non-respect du contenu du cahier des charges" : c'est l'argument officiel évoqué par les autorités guinéennes pour justifier leur décision de retrait des agréments d'exploitation des radios Fim FM, Radio Espace FM, Sweet FM, Djoma FM. Même chose pour la télévision Djoma TV. Une décision qui ne surprend pas vraiment Boubacar Sanso Barry de Djoma TV.
"Nous considérons même que c'est l'aboutissement d'un processus qui a commencé depuis l'année 2023... les restrictions ont commencé par les sites internet, ensuite il y a eu les réseaux sociaux..." explique-t-il tout en précisant qu'après les réseaux sociaux, ce sont désormais les programmes des radios et télévisions qui ont été pris pour cible.
De restrictions en restrictions
Depuis l'année dernière déjà, des stations de radios privées font en effet l'objet d'un brouillage constant de leur signal et des chaînes de télévision privées sont quasiment inaccessibles.
Pour l'ONG Reporters sans frontières, il est urgent que les autorités guinéennes mettent un terme à ces restrictions.
Selon Jeanne Lagarde responsable de plaidoyer Afrique subsaharienne à RSF "la répression des médias doit cesser parce que cela fait quand même quelques mois que cela dure". Elle rappelle par ailleurs que les autorités de transition s'étaient engagées à respecter la liberté de la presse.Outre les médias, des restrictions d'accès à internet ont également été imposées par les autorités en évoquant un problème de "sécurité nationale".
Un contexte socio-politique tendu
Selon Boubacar Sanso Barry il faut relier tout cela "au contexte de tension et de pression suscité par l'annonce par le Premier ministre que les élections ne se tiendraient pas en fin d'année et les réactions suscitées (...). Et se dire que du côté des autorités, c'est aussi couper l'herbe sous les pieds, peut-être à tous ceux qui voulaient s'opposer à cette logique de glissement, parce que ces médias constituaient un maillon important de cette riposte éventuelle."
Alors que les militaires avaient accepté, sous la pression de la Cédéao, de laisser la place aux civils d'ici la fin de l''année, le Front national pour la défense de la Constitution, qui est un collectif de la société civile, et l'Alliance nationale pour l'alternance et la démocratie, une coalition de l'opposition, ont menacé de reprendre les manifestations si la junte ne rendait, comme elle s'y était engagée, le pouvoir fin 2024.
Autre signe de tension dans le pays : l'interdiction des manifestations depuis 2022, les arrestations ou encore les opposants poussés à l'exil.
Selon Amnesty International, depuis 2021, l'année où la junte a pris le pouvoir par la force, la répression des manifestations a fait au moins 47 morts en Guinée.