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Des doutes face aux accusations contre Reckyath Madougou

5 mars 2021

L'opposante béninoise est accusée de faits de terrorisme. L'opinion est partagée entre ceux qui affirment que les faits sont réels et ceux qui en doutent.

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Le domicile de l'opposante Reckyath Madougou a été perquisitionné
Reckyath Madougou était l'initiatrice de la campagne "touche pas ma Constitution" au Bénin en 2004Image : privat

Une perquisition a eu lieu au domicile de l'ancienne ministre et opposante Reckyath Madougou (communément appelée Reckya). La candidate dont le dossier à la présidentielle du 11 avril a été rejeté était toujours ce vendredi (05.03) en garde à vue.

Le parquet de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) l'accuse d'avoir financé une opération visant à perturber le scrutin présidentiel en perpétrant des actes de terreur – et en l'occurrence il serait question de l'assassinat programmé de deux personnalités politiques. D'autres personnes ont aussi été arrêtées dans cette même affaire.

Des doutes et des appels au chef de l'Etat

L'opinion béninoise apparaît partagée entre ceux qui affirment que les faits sont réels et ceux qui ont des doutes. Plusieurs personnalités politiques, dont l'ex-première dame Rosine Soglo, ont dénoncé une affaire politique. "Qu’il nous dise clairement que Mme Reckya Madougou dérange parce qu’elle fait une campagne électorale", a notamment affirmé la députée béninoise dont les propos sont relayés par le journal La Nouvelle Tribune.  

Pourquoi certains Béninois doutent

Malgré les clarifications apportées jeudi (04.03) par le procureur spécial de la Criet, Mario Mètonou, des citoyens pensent qu'il s'agit d'un prétexte basé sur des faits inventés pour empêcher l'opposante de s'exprimer. 

Une attitude qu'explique Nadia Nata, experte sur les questions de gouvernance politique et de sécurité dont l'interview est à lire ou écouter ci-dessous.

Nadia Nata : Même si on parle d'indices de faits suffisants, concordants, le doute est permis dans la mesure où pour le moment, il n'y a pas encore de preuves à charge. Et il n'y a pas encore de condamnation non plus. Mais d'un point de vue politique, cela porte un problème en ce sens que, c'est comme si ça touche à la crédibilité des institutions, à la confiance que les citoyens ont vis-à-vis de leurs institutions, notamment l'indépendance du pouvoir judiciaire - son éventuelle instrumentalisation ou non. Cela pose un problème du point de vue politique du traitement qui pourrait être fait à tout ce qui est considéré comme étant de l'opposition.

Et ça, ce n'est pas seulement propre au Bénin. Actuellement ce qui se passe au Sénégal entre dans la même dynamique.

DW : Mais dans quelle mesure Madame Madougou représente-t-elle une menace pour le pouvoir de Patrice Talon ?

Nadia Nata : "C'est comme si cela touche à la confiance des citoyens"

Nadia Nata : Je ne parlerais pas en terme de menace. Ce que je dirais, c'est que c'est une personnalité dont il faut tenir compte d'une manière ou d'une autre dans le paysage politique béninois désormais. C'est quand même une ancienne ministre, elle est conue de la population béninoise. Hormis cela, du point de vue de l'actualité, elle est candidate et seule femme candidate à la magistrature suprême, même si sa candidature n'a pas été validée.

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Mais c'est qu'au-delà, c'est une dame qui a une présence au niveau international. Et enfin c'est que, au regard de sa propre posture, son propre comportement si je puis dire, c'est qu'elle fait face. Elle fait front, ne recule pas et elle essaie de défendre ses idées et sa position. C'est-à-dire que c'est une adversaire politique à prendre en compte à mon avis.

DW : Puisqu'on voit que le sujet suscite une certaine effervescence, que devraient faire les autorités béninoises à quelques semaines d'une élection présidentielle, pour que la gestion de ce dossier n'entraîne pas un climat électoral tendu ?

Nadia Nata : Tout ce qu'on attend, c'est que le dossier soit traité de façon transparente et impartiale. Peut-être, pour le pouvoir politique, car il y a séparation des pouvoirs, il faudrait initier un dialogue entre les acteurs politiques mais aussi au-delà avec les personnalités clés de la société civile, tous ceux qui pourraient aider à apaiser le climat politique actuellement qui, comme vous le dites, est tendu et pourrait être très vite crisogène si pas bien géré.

Et bien sûr les autorités doivent appeler le peuple à savoir raison garder, à attendre la suite du traitement de ce dossier et voir ce qu'il en sera après qu'il y ait un jugement.

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Photo de Fréjus Quenum, en interview dans le studio de la Deutsche Welle à Kinshasa en RDC (05.12.2024)
Fréjus Quenum Journaliste, présentateur et reporter au programme francophone de la Deutsche Welle@frejusquenum