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Cacophonie autour d’une possible base militaire russe en RCA

Jean-Fernand Koena
15 juin 2023

L'annonce d'une possible ouverture d'une base militaire russe et la construction d'un centre d'étude et de recherche nucléaire civil et militaire sème la confusion.

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Des combattants russes assurent la sécurité du président Touadéra
Les Russes sont en Centrafrique depuis plusieurs années notamment à travers le groupe paramilitaire WagnerImage : Andr.B/Xinhua News Agency/picture alliance

L'information a été donnée par le ministre conseiller spécial du président Touadéra et par l'ambassadeur centrafricain en poste à Moscou. Selon les deux hommes, Bangui s'apprêterait à accueillir à la fois une base militaire russe de 10.000 hommes et un centre universitaire de recherche nucléaire. Pourtant, la ministre des Affaires étrangères, affirme ne pas être au courant de ce double projet.

Etonnement et interrogations

L'information a été donnée avant le sommet Russie-Afrique qui se tiendra fin juillet à Saint-Pétersbourg. Sur sa page Facebook, le ministre conseiller spécial du président Touadéra, Fidèle Gouandjika, n'a pas fait dans la nuance : "La Centrafrique, première puissance nucléaire militaire en Afrique ? ", avait-il écrit.

Avant d'ajouter que le pays serait sur le point "d'accueillir une base militaire de 10.000 soldats russes et la construction par la première puissance nucléaire militaire mondiale, à l'université de Bangui et à Bakouma, d'un centre d'étude et de recherche nucléaire civil et militaire".

Sylvie Baïpo Témon la ministre des Affaires étrangères à Bangui
La ministre des Affaires étrangères, Sylvie Baïpo TémonImage : Pressedienst des Außenministeriums der Zentralafrikanischen Republik

Contacté, Fidèle Gouandjika s'est d'abord déclaré disposé à discuter avant de se rétracter lorsqu'il a su qu'il s'agissait du sujet de la base militaire russe.

Cette information a pourtant été aussi relayée par Leon Dodonou Pounagaza, l'ambassadeur centrafricain à Moscou, dans une interview accordée à Panafricanmediatv.

Mais sa supérieure directe, la ministre des Affaires étrangères, Sylvie Baïpo Témon, n'a pas caché sa surprise devant cette annonce.

"J'ai cru comprendre que c'était notre ambassadeur en Russie qui a eu l'interview. Mais je suis navrée de dire que peut-être il a une information que son ministre n'a pas ! Le ministre de la Défense ou le chef d'état-major se seraient présentés avec la partie russe pour dire : voilà ce que nous allons faire ? En tout cas, moi comme je vous ai dit, je ne suis pas au fait", assure à la DW la ministre.

Des opposants

La Russie, engagée dans un conflit difficile en Ukraine où son armée aurait perdu plus de 100.000 hommes, selon les renseignements américains, peut-elle envisager d'ouvrir une base à Bangui avec 10.000 militaires ? Mais aussi un centre de recherche nucléaire ?

Ecoutez les précisions de Jean-Fernand Koena

Le Bloc des Républicains pour la défense de la Constitution se montre pour sa part sceptique face à cette annonce.

"Qu'est ce qui est prévu pour cette base et à quoi elle sert ? Parce que c'est une décision qui tient à la souveraineté de l'Etat. Un Etat ne peut pas se dire indépendant et souverain si sur son territoire se trouve une base qui comporte des soldats plus nombreux et mieux équipés que ceux de l'armée nationale. Dans la déclaration de l'ambassadeur centrafricain à Moscou, il a dit que cette base servirait à intervenir dans les pays voisins. En vertu de quoi les Russes installeraient une base en République Centrafricaine pour intervenir dans les pays voisins ? A la demande de qui ? Donc l'un dans l'autre, c'est une démarche extrêmement dangereuse et nous sommes radicalement opposés à cela", assure Martin Ziguélé du Bloc des Républicains pour la défense de la Constitution.

A ce stade, si rien de plus concret ne semble exister concernant la base militaire russe et le centre de recherche universitaire sur le nucléaire, les déclarations discordantes au sommet de l'Etat témoignent de l'opacité sur laquelle repose la coopération entre Bangui et Moscou.