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Cameroun : quel bilan 30 ans après le multipartisme ?

Henri Fotso
2 juin 2020

Il y a trente ans que le Cameroun est revenu au multipartisme. C'était en mai 1990 avec le lancement du Social democratic front (SDF) de John Fru Ndi.

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Assemblée nationale du Cameroun.
Au bout de ces trente années de multipartisme, le Cameroun compte 317 partis politiques.Image : picture-alliance/dpa/Panapress/J. P. Kepseu

Trente après, le paradoxe est que le multipartisme cohabite avec un "monoprésident", Paul Biya, en place depuis 38 ans. Ce système se montrant incapable de résoudre la crise anglophone actuelle.

"Il s'agit d'un système qui verrouille toute velléité d'alternance au pouvoir. Et dans ces conditions, il faut dire que même si Jésus Christ descend pour mettre sa candidature contre Paul Biya, Jésus sera battu."

Cette déclaration est de Carlos Ngoualem, haut cadre du parti d'opposition SDF à Douala. Pour lui, après le retour au multipartisme qui s’était fait à l’époque dans la violence, la présidentielle de 1992 avait été gagnée par l'opposant historique John Fru Ndi du SDF, mais sa victoire fut volée.

"Le bilan du processus démocratique depuis 1990 est un bilan mitigé. L'alternance qu'on souhaitait n'est pas arrivée 30 ans après. Nous avons obtenu le multipartisme, mais nous n'avons pas obtenu la démocratie", explique-t-il. 

Pour Hervé Emmanuel Nkom du Comité central du RPDC au pouvoir, les partis d'opposition qui accusent le régime de Biya de dictature ne sont pas eux-mêmes des modèles démocratiques.

"L'alternance politique, c'est la volonté souveraine du peuple souverain. Quand un peuple a envie de changer ses dirigeants, il les change. Donc il est très facile pour certains qui, à défaut de proposer un projet alternatif qui soit accepté par le peuple, de dire que c'est parce que Paul Biya est là depuis longtemL'Allemagne attendue sur la crise anglophone au Camerounps, donc nous sommes en dictature. Moi, je suis désolé, on a pire ailleurs", soutient M. Nkom. 

A lire aussi : L'Allemagne attendue sur la crise anglophone au Cameroun

 

La longévité au pouvoir de Biya, malgré le multipartisme 

C'est dans ce contexte politique que le Cameroun doit affronter un double défi :les attaques de Boko Haramau nord du pays et la guerre civile dans les régions anglophones.

"Il faut dire que l'une des causes de la crise anglophone c'est la longévité du président actuel de la République et même du régime actuel. S'il y avait eu un autre président, il y aurait eu certainement moins de tension. Une des revendications de la crise anglophone était la mise en place d'un système fédéral", raconte Carlos Ngoualem.

 

Pour Hervé Emmanuel Nkom, le multipartisme aurait pu être l'occasion de présenter au peuple des offres alternatives, mais beaucoup d'acteurs politiques l'ont biaisé. 

Selon ce dignitaire du régime, les promesses de paix et de prospérité, dans un contexte de multipartisme, n’ont pas été tenues, ce qui exacerbe de la crise anglophone.

"Les autres partis ont biaisé. Vous voyez, aujourd'hui, à l'occasion de quelques escarmouches, on peut entendre des voix s'en prendre aux Ambazoniens. Mais pendant l'élection, aucun d'eux n’a dit que le Cameroun doit rester un et indivisible. Ce n'est pas la faute du pouvoir RDPC ni de Paul Biya", estime Hervé Emmanuel Nkom. 

Au bout de ces trente années de multipartisme, le Cameroun compte 317 partis politiques. Ce multipartisme cohabite avec un président omnipotent, en poste depuis 38 ans.

"Pour nous l’avenir du Cameroun est sans le régime de Paul Biya" (Edith Kahbang Walla)