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Les conditions du Burkina dans l’affaire des agents français

25 janvier 2024

La junte réclamerait l'extradition de personnalités exilées en France, en échange de quatre agents des renseignements français détenus à Ouagadougou. Refus de Paris.

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Un soldat français lors d'une opération au Burkina Faso (06.11.2019)
Ouagadougou a dénoncé en mars 2023 un accord militaire de 1961 avec la France, après avoir obtenu le retrait des forces françaises. L'ambassadeur de France à Ouagadougou, rappelé après le coup d'Etat de septembre 2022, n'a pas été remplacé depuisImage : Philippe de Poulpiquet/MAXPPP/picture alliance

D'après le magazine panafricain Jeune Afrique, qui cite plusieurs sources proches du dossier, les autorités militaires burkinabè réclameraient l'extradition de plusieurs personnalités burkinabè, dont l'ancien ministre Djibrill Bassolé, François Compaoré, ou encore l'ancien président de la Commission électorale indépendante, Newton Barry, en échange des quatre agents des services de renseignements français (DGSE).

Paris aurait adressé une fin de non-recevoir et les négociations ouvertes entre les deux pays pour parvenir à leur libération seraient au point mort.

Impossible d’extrader les exilés

Il est impossible pour la France de céder à une telle demande, estime le général Dominique Trinquand, expert militaire et ancien conseiller défense d'Emmanuel Macron.

"C'est du chantage, ça me paraît totalement improbable que la France extrade des gens qui sont venus chercher refuge en France, ou les livre au Burkina Faso. C'est contre le droit français", a expliqué le général français.

Maixent Somé, politologue burkinabè et spécialiste des questions sécuritaires, suit lui aussi cette affaire. Il estime que la demande de la junte n'est pas surprenante, puisque le chef de la junte, le capitaine Ibrahim Traoré, se comporte, selon lui, comme un autocrate.

"Des régimes qui violent leur Constitution ignorent ce que c'est que l'Etat de droit et imaginent que dans les autres pays, c'est comme ça. Le président Emmanuel Macron, même s'il le voulait, ne pourrait pas attraper ces gens-là comme des poulets pour aller les livrer", a déclaré Maixent Somé.

Des soldats français dans le Sahel (26.03.2019)
Les relations entre la France et le Burkina se sont considérablement dégradées depuis l'arrivée au pouvoir en septembre 2022 par un coup d'Etat - le deuxième en huit mois - du capitaine Ibrahim Traoré.Image : Daphné Benoit/AFP/Getty Images

Que cherchent encore les agents de la DGSE au Burkina ?

Paris considère les accusations de la junte comme un prétexte et souligne que l'arrestation des agents français serait liée à l'arrivée de membres du renseignement russe au Burkina Faso. Et Maixent Somé dit ne pas comprendre la présence des agents français au Burkina, malgré la défiance de la junte vis-à-vis de Paris.

"Mais la vraie question qu'il faut se poser, c'est : pourquoi la DGSE continue à collaborer avec l'ANR (renseignements burkinabè), alors que le régime burkinabè a montré systématiquement sa défiance vis-à-vis de la France et sa volonté de rompre toute collaboration avec la France ?", s’est-il demandé.

Le général Dominique Trinquand explique que "premièrement, cela n'a pas été aussi clair dès le départ. Il y a des tranches du pouvoir burkinabè qui voulaient continuer à travailler avec les Français. Et le deuxième point, c'est que la lutte contre le djihadisme ne concerne pas que le Burkina Faso. Ça concerne toute la région et ça concerne la France."

Cette affaire sensible irrite au sommet de l'Etat français et la cellule de crise mise en place s'active, via des pays voisins du Burkina Faso, pour obtenir la libération des agents de la DGSE.