Aide médicale d'urgence pour les réfugiés traumatisés

Parmi les réfugiés qui sont venus en Allemagne en 2015 et 2016, on estime qu'environ 250 000 étaient traumatisés.

Une note d’information publiée la semaine du 23 avril par l'Académie allemande des sciences, "Leopoldina", et l'Académie des sciences de Berlin-Brandebourg, intitulée "Réfugiés traumatisés - un traitement précoce est nécessaire maintenant", explique que beaucoup de migrants ont connu la pauvreté extrême, la violence et la torture. Beaucoup ont également perdu des membres de leur famille. Il en résulte une incidence élevée de maladies psychologiques et physiques.

De l’insomnie au suicide

Le degré et l'étendue des symptômes sont divers et vont de l'insomnie aux cauchemars, en passant par un système immunitaire affaibli , ou encore la toxicomanie, jusqu'à l'automutilation et parfois même le suicide.

Outre les symptômes physiques, ces réfugiés affrontent également souvent des difficultés sociales tels que l'incapacité à communiquer, à nouer et maintenir des relations et d'apprendre une nouvelle langue - facteurs essentiels à l'intégration dans la société -, selon les spécialistes. Et pourtant, ceux qui souffrent de ces symptômes de stress psychologique et de traumatismes ne reçoivent pas l'aide dont ils ont besoin.

"L'un des problèmes est que les migrants reçoivent un traitement psychiatrique selon le principe du premier arrivé, premier servi", explique Malek Bajbouj, qui dirige un groupe de neurosciences à l'hôpital universitaire Charité à Berlin, et qui est l'un des auteurs de la note d’information. "[Mes collègues ont décrit] une personne qui présentait des symptômes de stress très légers et qui avait pourtant suivi une thérapie traumatologique très poussée. Cette patiente disait qu'elle souffrait de troubles du sommeil et qu'il lui arrivait de temps en temps de penser à ce qui s'était passé en Syrie. Dans le même temps, un autre patient qui fait des cauchemars atroces et qui a des pensées suicidaires doit patienter pour obtenir un traitement", poursuit-il.

Restructurer le système

A l'échelle de l'Allemagne, il n'existe pas de chiffres disponibles sur les réfugiés et les troubles psychiatriques - les résultats de la première étude de ce type utilisant un "examinateur de santé des réfugiés" seront publiés dans les deux prochains mois. Mais le professeur Bajbouj et ses collègues disent qu'il est clair que les agents de santé ne peuvent pas s’occuper de toutes les personnes qui ont besoin d'aide.

Selon Malek Bajbouj, la manière dont le système de santé allemand est structuré fait que les personnes qui ont besoin d'une aide psychiatrique professionnelle urgente ne sont pas prioritaires, notamment parce qu'il n'y a pas de dépistage fait assez tôt.

Une solution, serait selon les spécialistes, d'offrir à tous les migrants un dépistage psychiatrique à leur arrivée pour déterminer s'ils ont besoin d'un traitement. Les personnes gravement traumatisées pourraient alors être dirigées vers une psychothérapie professionnelle. Et celles dont les symptômes sont moins graves pourraient avoir accès à un soutien de niveau inférieur, comme par exemple être conseillées par des personnes issues de l’immigration ou des réfugiés ayant reçu une formation spécifique.

A l'heure actuelle, le dépistage n'est pas obligatoire, de sorte que certains migrants qui ont besoin d'aide ne sont pas repérés. En outre, la stigmatisation de toutes sortes de maladies mentales empêche encore de nombreuses personnes de demander de l'aide. Le professeur Bajbouj et ses collègues espèrent que le fait d'offrir aux migrants la possibilité d'être conseillés par des gens qui parlent leur langue et qui connaissent l'expérience des réfugiés sera utile. Il dit aussi que le numérique, comme les applications sur le stress et les troubles psychologiques, peut faciliter la recherche d'un traitement.

Une solution économique

Les auteurs de la note d’information politique affirment que leur proposition est efficace et économique. C'est peut-être la meilleure solution à la pénurie de thérapeutes professionnels en Allemagne. M. Bajbouj a dit à InfoMigrants qu'il croit qu'il y aura suffisamment de gens disposés et capables de fournir des conseils à leurs pairs. "Une fois que vous demandez à des gens de ce milieu culturel d'aider, d'intervenir, des gens avec une formation en psychologie ou en biologie ou des étudiants ou quoi que ce soit d'autre, vous trouvez ces gens."

La note d’information politique "Réfugiés traumatisés - un traitement précoce est nécessaire maintenant" peut être téléchargé en format pdf (en allemand) ici.

Cet article a été publié pour la première fois sur le site InfoMigrants: http://www.infomigrants.net/fr/post/8996/allemagne-les-refugies-traumatises-ont-besoin-d-une-aide-medicale-d-urgence